Gestion des versions et packaging 📦

Dans le monde du développement logiciel, il est essentiel de communiquer clairement l'ampleur et la nature des changements apportés à chaque nouvelle version d'un programme.

Contrairement à ce qu'on pourrait penser, les numéros de version des logiciels ne sont pas choisis au hasard. Ils suivent une logique précise qui a un impact direct sur tous ceux qui utilisent votre code – équipes de développement, utilisateurs finaux et systèmes automatisés.

Les ingénieurs logiciels utilisent donc des conventions de versioning pour transmettre des informations essentielles : quels types de changements ont été apportés, si une mise à jour risque de casser le code existant, ou si elle apporte simplement des corrections mineures.

Dans cette section, nous allons explorer le versioning sémantique (semantic versioning), l'une des approches les plus répandues pour structurer les versions de logiciels. Cette méthode offre un cadre commun pour comprendre l'impact potentiel d'une mise à jour sur la compatibilité et la stabilité d'une application.

Format du versioning sémantique

Vous avez sûrement déjà rencontré de nombreux exemples de versioning sémantique sans le savoir. Ce système suit un format très simple et reconnaissable : trois nombres séparés par des points :

  • MAJEUR.MINEUR.CORRECTIF

Exemples :

  • Extensions VS Code : 3.5.0
  • Bibliothèques Python : 2.1.4
  • Frameworks : 1.0.0

Cette structure à trois composants permet de transmettre immédiatement des informations cruciales sur la nature des changements, sans avoir besoin de lire de longues notes de version.

Selon la spécification officielle (semver.org) :

  • MAJEUR : Changements incompatibles (rupture de compatibilité)
  • MINEUR : Nouvelles fonctionnalités compatibles avec les versions précédentes
  • CORRECTIF : Corrections de bugs sans nouvelles fonctionnalités

Durant la phase initiale de développement, la gestion des versions suit une approche progressive. Il est recommandé de débuter avec la version 0.1.0, puis d'incrémenter le numéro mineur à chaque nouvelle nouvelle version. Cette numérotation débutant par 0 (ex: 0.1.0, 0.2.5) signale que le projet est encore en phase de développement actif.

Le passage à la version 1.0.0 marque une phase importante : il indique que le logiciel est suffisamment stable pour une utilisation en production. Si votre code est déjà déployé dans un environnement de production, il devrait porter au minimum le numéro de version 1.0.0. Cette convention communique aux utilisateurs que l'API est stable et que les changements futurs respecteront la rétrocompatibilité.

La version 0.0.0 est généralement réservée aux aux prototypes, signalant un code susceptible de subir des modifications importantes.

Exemple de version majeure : Python 2 vers Python 3

L'histoire du versionnage en Python offre une leçon importante sur l'impact des changements majeurs. En décembre 2008, Python 3.0.0 a marqué une rupture historique avec Python 2, illustrant ce qu'implique un changement de version majeure selon le versionnage sémantique. Cette transition a introduit des modifications incompatibles, comme l'obligation d'utiliser des parenthèses pour la fonction print :

# Python 2
print "Hello world"

# Python 3
print("Hello world")

Au-delà de ce changement symbolique, Python 3 a apporté des modifications qui ont nécessité la réécriture de nombreuses bibliothèques. Cette transition difficile a temporairement divisé la communauté et certains projets ont été abandonnés faute de ressources pour la migration.

Pour éviter de futurs bouleversements et garantir une évolution maîtrisée, Python s'appuie sur le système des Python Enhancement Proposals (PEP). Ces documents formalisent le processus de proposition et d'adoption de nouvelles fonctionnalités, créant un cadre structuré pour l'évolution du langage.

Le système PEP fonctionne comme un garde-fou qui assure que les nouvelles fonctionnalités sont minutieusement étudiées avant leur intégration. La rétrocompatibilité est préservée autant que possible, évitant ainsi les changements disruptifs comme celle vécue lors du passage de Python 2 à Python 3. Ce processus assure également l'implication de la communauté dans les décisions importantes et une documentation complète de chaque changement.

Depuis la stabilisation qui a suivi l'adoption de Python 3, chaque version apporte des améliorations tout en respectant la rétrocompatibilité. Python 3.5 et 3.6 ont modernisé le langage avec le type hinting, la syntaxe async/await et les f-strings, transformant la façon d'écrire du code Python.. Les versions 3.7 et 3.8 ont enrichi l'expressivité du langage avec les dataclasses et l'opérateur walrus (:=), simplifiant l'écriture de code.

Python 3.9 et 3.10 ont introduit de nouveaux opérateurs de fusion pour les dictionnaires et le pattern matching. Python3.11 et 3.12 ont apporté des améliorations de performance ainsi que des messages d'erreur plus détaillés pour faciliter le débogage.

Ces évolutions illustrent parfaitement l'application du versionnage sémantique : chaque version mineure enrichit le langage de nouvelles fonctionnalités sans jamais compromettre le code existant, permettant aux développeurs d'adopter les nouveautés à leur rythme tout en maintenant la stabilité de leurs projets.

Dans un contexte Ops (MLOps, DevOps, DataOps), la cohérence des versions Python entre les environnement de développement et de production est importante. Des différences même mineures (3.11.2 vs 3.11.8) peuvent causer des incompatibilités subtiles, notamment sur des plateformes cloud.

Bonnes pratiques :

  • Maintenir une version Python identique sur tous les environnements.
  • Isoler chaque projet dans son propre environnement virtuel.
  • Spécifier clairement les versions requises dans la documentation technique.

Le packaging Python

Le packaging Python désigne l'ensemble des pratiques et outils permettant de transformer du code en une distribution installable. Si un module est un fichier Python et une librairie un ensemble de fonctionnalités, un package est une unité structurée avec métadonnées, dépendances et instructions d'installation.

Chaque fois que vous exécutez pip install <package>, vous interagissez avec le système de packaging Python sans nécessairement en comprendre les mécanismes. Un package regroupe donc du code Python, des métadonnées de configuration et des instructions d'installation dans un format distribuable. Le Python Package Index (PyPI) sert de référentiel central, hébergeant ces packages sous forme d'archives ZIP.

Le packaging repose sur trois piliers fondamentaux. Premièrement, il offre une distribution simplifiée en transformant votre code en un produit facilement installable via une simple commande pip install. Deuxièmement, il révolutionne la gestion des imports en éliminant les chemins relatifs complexes. Là où vous deviez auparavant manipuler sys.path et utiliser des imports alambiqués comme from ../../utils/helpers import function, un package bien structuré permet des imports clairs. Troisièmement, et c'est peut-être l'aspect le plus important, le packaging garantit la reproductibilité en assurant des résultats identiques indépendamment de l'environnement d'exécution.

Pour naviguer dans l'univers du packaging, il est essentiel de comprendre la distinction entre ses différents composants. Un module est simplement un fichier Python importable, comme my_file.py. Un package est un dossier contenant un fichier __init__.py et potentiellement d'autres modules ou sous-packages. Cette structure hiérarchique permet d'organiser logiquement le code en unités cohérentes. Le distribution package, quant à lui, représente l'archive installable via pip, c'est ce que vous téléchargez lorsque vous installez numpy, pandas ou toute autre bibliothèque depuis PyPI. Une structure de package moderne et complète comprend généralement un dossier source contenant le code organisé en packages et sous-packages, chacun avec son fichier __init__.py, ainsi qu'un fichier pyproject.toml pour la configuration et un README pour la documentation.

L'histoire du packaging Python reflète l'évolution de la communauté et ses besoins croissants. Dans les années 90, Python proposait Distutils comme solution native, mais sa complexité décourageait son adoption. La communauté a répondu en créant Setuptools, un wrapper qui simplifiait considérablement l'interface tout en introduisant le désormais familier setup.py. Aujourd'hui, l'écosystème s'est enrichi d'outils modernes comme Poetry, pip-tools et plus récemment uv, qui simplifient encore davantage la gestion des dépendances et le packaging.

💡 Simplification avec uv

Avec uv, les opérations courantes deviennent particulièrement simples. L'installation en mode développement se fait via uv pip install -e ., permettant de tester les modifications en temps réel. La compilation des dépendances avec uv pip compile et la synchronisation de l'environnement via uv pip sync assurent une gestion rigoureuse des versions. Enfin, uv build permet de créer facilement un package distribuable prêt à être partagé ou déployé.

Cette connaissance du packaging transforme la façon dont vous développez et partagez votre code Python, marquant la transition vers un développement professionnel et collaboratif.

Le packaging Python est une compétence clé pour distribuer du code efficacement et travailler de manière professionnelle dans l'écosystème Python.